Pendant le Fespaco, on marche beaucoup d’un lieu à un autre du festival. Les cinémas, les lieux de conférences, le marché du film (MICA) et les salles annexes sont disséminées à travers la ville et il faut avoir de bonnes chaussures ou une moto pour naviguer d’un lieu à un autre. Les taxis ne sont pas aussi répandus que dans d’autres capitales africaines, car il semblerait qu’à Ouagadougou beaucoup plus de personnes se déplacent en deux roues qu’ailleurs. Toutes les classes sociales, toutes les générations, hommes et femmes, parfois avec leurs bébés attachés au dos, tout le monde ou presque est en deux roues.
Les projections commencent vers 16h pour nous avec le film BABA SIFON du réunionnais Laurent Pantaléon avec qui nous n’avions échangé que par email jusque là. Il a pu faire le voyage sans trop d’encombres et est déjà au Ciné Burkina plus d’une heure avant la projection. Il faut dire que c’est son deuxième film à être sélectionné au festival alors on imagine qu’il a acquis quelques réflexes de survie. Son film précède le long métrage malien BARKOMO de Boucary Ombotimbé et Aboubacar Bablé pour cette première projection au Fespaco 2019. BABA SIFON est un court métrage qui raconte le périple d’un père qui traverse l’île en stop pour ramener à sa fille le doudou qu’elle a oublié chez lui avant de repartir chez sa mère dont il est séparé. Une histoire touchante et simple d’amour paternel qui est l’un des thèmes chers au réalisateur. Après la projection Laurent est tout de même déçu de sa projection. Pour lui, le niveau du son n’était pas optimal et il déplore les allées et venues du public qui prenait place pendant son film pour voir le film suivant. Nous croisons avec lui les doigts pour que la prochaine projection se passe dans de meilleures conditions.
Nous filons ensuite assister à la projection du film rwandais LA MISÉRICORDE DE LA JUNGLE de Joël Karekezi. Un film qui suit deux soldats rwandais qui se retrouvent abandonnés par leur bataillon en pleine jungle et qui vont devoir y rester cachés pour survivre. Le film avait eu sa première mondiale au Festival de Toronto en septembre dernier et le Rwanda étant le pays invité d’honneur de ce Fespaco, c’est un peu l’un des films phare de la sélection officielle cette année. Le moment magique de l’échange avec le public est quand même le moment où toute l’équipe se présente et où on comprend que la dame très élégante qui est débout à côté du réalisateur n’a rien à voir avec le film mais a voulu le suivre sur la scène tellement elle avait aimé le film.
La journée se termine au Village du CNA devant 4 courts métrages de la première session du Centre Yennenga de Dakar. Le principe : 30 jeunes dont 15 sénégalais ont réalisé en 3 semaines des courts métrages dans le cadre d’un atelier encadré par Alain Gomis à Dakar. Le réalisateur qui est chez lui à Ouagadougou après ses deux Etalons d’Or (2013 et 2017) ici a fait le déplacement et dit deux choses très importantes après la projection : Il a surtout encouragé les participants à ne pas faire de films qui ressemblaient à ce qu’ils avaient déjà vus. Il fallait autant que faire se peut proposer quelque chose de neuf. Ensuite, quand on lui demande pourquoi il s’embête à aller animer des ateliers plutôt que travailler sur ses projets il répond qu’animer ces ateliers était tellement stimulant et bénéfique pour lui à titre personnel, d’un point de vue artistique qu’il se sentait presque honteux d’avoir cette chance. Etre en contact avec ces jeunes était pour lui une expérience extrêmement gratifiante et ce n’était surtout pas du temps perdu, bien au contraire.
W. F.